COUTÉ Pascal, « Du film “Zapruder” à ''Snake Eyes'' de Brian De Palma » in AMIEL Vincent & FARCY Gérard-Denis (dir.), ''Mémoire en éveil, archives en création'' (issu du colloque « L'Invention et l'archive, théâtre et cinéma », CREDAS/IMEC, 13-15/03/2003) L'Entretemps, Vic la Gardiole, 2006. ISBN: 2-912877-51-2. pp 111-118 --- == Abraham ZAPRUDER == Filme par hasard l'assassinat de John Fitzgerald KENNEDY, le 22/11/1963 à Dallas * caméra 8 mm * le seul document visuel de l'assassinat * impact majeur sur cinéastes des 70s Ce film : * est un indice (un signe qui est la trace de la chose signifiée) - par sa dimension photographique - par sa forme brute * n'est pas l'assassinat de KENNEDY - il est « la trace de l'évènement qui ne montre celui-ci qu'à travers les conditions de sa captation » (p.113) - limitation spatio-temporelle (montrer sans révéler) == ''Snake Eyes'', Brian De Palma (1998) == Inspiré par l'assassinat de KENNEDY < inspiré par le film de ZAPRUDER * une archive transformée en œuvre de création === Structure === Reprend la structure de ZAPRUDER * Avant l'assassinat/l'assassinat/après l'assassinat MAIS Le premier tronçon est plus long que les autres === Virtuosité === De Palma souligne le caractère imagier du film de ZAPRUDER * UN FAIT < DES IMAGES - mise à distance du réel === Focalisation === Sur la victime (Z.) * uniquement * plan-séquence Sur le policier enquêteur (DP.) * en décentrant çà et là sur des personnages importants * finit sur plusieurs contre-champs de la foule « Le film Zapruder se caractérise par un seul angle de prise de vue, à aucun moment Zapruder ne tourne sa caméra pour filmer le contrechamp de ce que l'on voit. Retravailler le film preuve et partir à la recherche des autres angles de prise de vue, voilà ce qui deviendra le passage obligé des futurs personnages de Brian De Palma. Pour le cinéaste, il faudra à nouveau transformer la prise de vue initiale et proposer une mise en scène plus complète. Revenir aux images du passé et les remodeler devient donc pour Brian De Palma autant un programme de cinéma qu'un programme politique. » (LAGIER Luc, émission ''Court-circuit'', Arte, 04/07/2002) == Rapport entre le film « ZAPRUDER » et ''Snake Eyes'' == === Problèmes dans le régime des images === Premières parties de l'assassinat dans ''Snake Eyes'' * Fonctionne comme une « icône » [C.S. PEIRCE] du modèle ZAPRUDER (représentation analogique du modèle premier) Dernière partie (discontinuité formelle/pluriponctualité) * Fonctionne comme un « symbole » [C.S. PEIRCE] du modèle ZAPRUDER (signe détaché de la chose qu'il signifie) AINSI Création = révélation CAR création : passer de la captation indicielle à la relecture iconique MAIS Les traitements de l'image vraie et mensongère sont identiques DONC * une mise en question de la véracité des images * un rapport complexe entre archive et création - archive : se limite à montrer (pas de révélation) - création : révèle MAIS peut mentir * la quête d'une méta-image ==== Méta-image ==== Une image a-subjective, donc potentiellement vraie MAIS * traitée au même niveau que les autres images * traitée par un regard (donc un point de vue) - + de points de vue sur l'image = − de vérité dans l'image === L'image d'un modèle === [PLATON, ''Le Sophiste''] * l'image comme copie - un rapport de ressemblance - la "bonne image" * l'image comme simulacre - une ressemblance apparente / une dissemblance réelle - la "mauvaise image" [NIETZSCHE] * la simulation est première * le modèle est un déni de simulation - Renversement du platonisme - pas de modèle DONC pas de copie ''Snake Eyes'' est d'inspiration nietzschéenne sur cette question : 1. Partir du film « ZAPRUDER » 2. Générer de la dissemblance / Mettre le doute au cœur du film - ça semble être les mêmes images MAIS elles sont différentes 3. Subvertir le film « ZAPRUDER », défaire sa primauté